Sommes-nous dans les derniers temps du monde, les derniers temps de l’Église, annoncés ici par le Christ ? La question n’a cessé de se poser, depuis 2000 ans. Dès la première lettre de Saint Pierre ou la première lettre de Saint Paul aux Thessaloniciens, l’un et l’autre annonçaient déjà « la fin imminente de toutes choses » (1P 4, 7). Mais, voyant que la fin annoncée tardait à venir, saint Pierre s’explique en citant les écritures : pour Dieu, « mille ans sont comme un jour » (2P 3, 8) ; et de son côté saint Paul modère son ardeur en écrivant une seconde lettre aux chrétiens de Thessalonique : « Nous apprenons que certains d’entre vous mènent une vie déréglée, affairés sans rien faire. À ceux-là, nous adressons dans le Seigneur Jésus Christ cet ordre et cet appel : qu’ils travaillent dans le calme pour manger le pain qu’ils auront gagné » (c’est le passage que nous avons entendu dans la seconde lecture). Voilà pour les tout premiers temps de l’Église.

Par la suite, il ne s’est pas passé un siècle depuis les premiers chrétiens où cette imminence n’ait été à nouveau prédite par diverses prophéties puis démenties par les faits. C’est encore le cas aujourd’hui et de nombreuses publications écrites ou vidéos postées circulent ici et là, nous donnant en forme de quasi-preuves la liste des catastrophes annonciatrices de la fin du monde : le dérèglement climatique rappelé ces derniers jours par la COP 27 et la multiplication de catastrophes écologiques dont l’avidité des hommes n’est pas étrangère. Ajoutons y la guerre en Ukraine, les replis nationalistes un peu partout, la montée des extrémismes et bien d’autres tempêtes sociales. Des tempêtes auxquelles s’ajoute celle qui secoue ces derniers temps l’Église, gangrénée par les révélations ininterrompues de scandales sexuels commis par des personnes ayant autorité, jusqu’au sommet de la hiérarchie.

La prophétie serait-elle en train de se réaliser ? Ce qui est certain, c’est que le XXème siècle aura pu ressembler à la fin des temps, tellement il y a eu de morts et de conflits internationaux terrifiants dont le 11 novembre a fait mémoire. Or, ce ne fut pas encore la fin. Pourtant, ce qui est aussi une certitude, c’est que nous assistons aujourd’hui à une dégradation du climat politique et que nous entrons dans une période de troubles mondiaux majeurs, auxquels il faut ajouter les troubles qui secouent l’ Église elle-même, et qu’il serait absurde et même criminel de les ignorer.

Pour autant, la peur n’est jamais d’inspiration divine. Là où il y a la peur, le Malin n’est pas loin, lequel veut nous pousser sans cesse à désespérer de Dieu ou même de l’Église. Combattons la peur de toutes nos forces ! « Beaucoup viendront sous mon nom, nous redit Jésus aujourd’hui, et diront : “c’est moi”, ou encore : “le moment est tout proche”. Ne marchez pas derrière eux », « ne soyez pas terrifiés ».

La vraie question n’est pas de savoir ‘quand’ viendra la fin : celle-ci est en effet déjà commencée et nous sommes dans les temps de la fin ! La vraie question est celle de notre préparation personnelle et collective à cette heure ou, comme dit Jésus, « tout sera détruit ». Jésus insiste, aujourd’hui : « soyez donc prêts ». Or, « être prêts », c’est lutter de toutes nos forces et avec la grâce de Dieu contre ce qui détruit ou abîme en nous, dans l’Église et dans le monde la Vie éternelle déjà commencée : lutter de toutes nos forces contre la guerre, la haine, le mensonge, la malveillance, l’exclusion, les abus de pouvoir, la culture de mort. Nous devons plus que jamais employer le langage de l’amour et renoncer à employer tout autre langage. Lui seul est capable de vaincre le langage de la haine ou de l’indifférence coupable. Quoi qu’il en coûte.

La tâche nous semble impossible ? Jésus nous fait aujourd’hui cette promesse : « Je vous donnerai, dit Jésus, un langage et une sagesse à laquelle tous vos adversaires ne pourront ni résister ni s’opposer ». Apprends-nous, Seigneur, le langage de l’amour et que ton Règne vienne !

Père Rémy CROCHU

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