« Tous pour un, un pour tous »

Qui ne connaît cette célèbre devise des 3 mousquetaires d’Alexandre Dumas ! Elle donne bien le sens du mot “solidarité” qui m’habite ces derniers temps. Un mot plutôt à la mode, y compris chez les chrétiens, même s’il n’appartient pas au vocabulaire des évangiles. Il a le mérite en effet de souligner le lien de dépendance qui unit « solidement » (« in solidum ») celui qui peine et celui qui se porte à son secours. Bien sûr on peut lui préférer des mots ou expressions comme « service du frère », « charité », « amour en actes ». Ce sont des nuances pour éclairer une même réalité.

Ces dernières semaines — et ceci a fortement inspiré ou décidé ce petit éditorial — la paroisse a vu débarquer à l’improviste une petite famille en détresse. Bien que présents sur le territoire français depuis des mois, ils venaient de se voir refuser leur demande d’asile, et, craignant leur expulsion imminente, ils ont fui leur logement breton pour errer ça et là, jusqu’à arriver chez nous. Depuis deux jours, ils vivaient à quatre dans leur voiture…

En quelques heures et grâce à l’énergie folle dépensée par quelques amis ou bénévoles et par des associations humanitaires, ils ont fini par trouver les soutiens nécessaires pour retrouver un logement décent et de quoi se nourrir, la scolarisation des deux enfants et un nouveau répit dans la gestion juridique de leur dossier de « sans-papiers ».

Nous avons été plongés sans nous en rendre compte au cœur de la problématique soulevée par le pape François dans « Tous Frères » (Fratelli Tutti »). Il y commente la célèbre parabole du « bon samaritain » (Luc 10) où ce dernier prend compassion du blessé au bord du chemin.

Si les chrétiens n’ont pas le « monopole de la charité », celle-ci est bien au cœur de tout, jusqu’à prendre une infinité de formes. Et chacun de vous pourrait témoigner de sa manière propre de se rendre « solidaire » d’une personne, d’un couple, d’une famille. La solidarité inspire celui qui prie comme celui qui sert. Elle inspire celui qui écoute comme celui qui témoigne. Elle inspire « celui qui a » comme « celui qui n’a rien ». Le souci du frère est une disposition intérieure à l’inattendu. Une disposition qui sollicite « l’élan de notre générosité, pour reprendre l’expression de Saint Paul (Cf. Rom 12, 9). Un élan qui poussera le « bon samaritain » à charger le blessé sur sa monture et mettre la main à la poche pour qu’il soit pris en charge par l’aubergiste (au passage, notre petite famille aura besoin de la générosité de qui pourra les aider financièrement…).

Connaissez-vous la recette de l’omelette aux lardons ? Il faut… des œufs et des lardons ! Et donc — bravo ! — une poule et un cochon ! Si les deux interviennent dans la recette, ce n’est pas au même titre. La poule est « concernée » (elle donne les œufs) ; et le cochon, lui, est « impliqué » (il donne sa vie) ! Petite question : auprès de qui suis-je « impliqué » dans la recette de la solidarité évangélique ?

Jésus, dont nous allons célébrer le mystère pascal, n’a pas hésité, lui : impliqué !

Père Rémy CROCHU, curé

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