L’évangile d’aujourd’hui nous invite à… l’évangélisation ! Mais soyons réalistes. Peu d’entre nous se mettront — comme Jésus y invite les disciples, aujourd’hui — à sillonner villes et villages pendant l’été. C’est pourquoi je vous propose d’aborder la question de l’évangélisation sous un autre angle, et qui est aussi au cœur du récit que nous venons d’entendre.
Il s’agit de la consigne de Jésus à ses disciples quand il leur dit : « Je vous envoie comme des agneaux parmi les loups. » Tout d’abord, l’annonce de la foi au Christ est risquée, elle est périlleuse encore aujourd’hui, et elle le sera jusqu’à la fin des temps. Il serait trop long d’en développer le pourquoi, sinon pour dire que l’évangile est porteur d’un message de paix, d’amour et de justice, et que les idéologues, les faux messies, les dictateurs et les violents ne peuvent s’accommoder d’un tel message. C’est pourquoi l’on a crucifié Jésus. Le même sort menace ses disciples, car en suivant le Christ ils s’engagent dans un combat pour le bien et pour la vérité.
Par ailleurs, cette image des agneaux qu’emploie Jésus vient nous rappeler que l’évangélisation n’est pas une entreprise de séduction ou de conquête. Elle est une proposition de vie qui doit être offerte avec le plus de délicatesse et de bienveillance possible. Car, ne l’oublions pas, les disciples sont appelés à imiter leur maître, lui qui est doux et humble de cœur.
Comme lui, les disciples sont appelés à s’en remettre entièrement à Dieu. Remarquez dans le récit d’aujourd’hui qu’ils n’apportent ni argent, ni provisions, ni sandales. Ils acceptent l’hospitalité qu’on veut bien leur offrir. Ils n’imposent rien, n’entrent en conflit avec personne, parce qu’ils sont porteurs de la paix du Christ. Et quand on ne veut pas les entendre, ils reprennent tout bonnement leur chemin, secouant la poussière de leurs pieds, afin de bien signifier que leur « démarche est totalement désintéressée, et que les bénéficiaires du message restent toujours libres de le refuser. » L’évangile de ce dimanche nous interpelle donc quant à la manière dont nous devons partager notre foi avec les autres.
La foi ne s’impose pas. Nous voulons seulement offrir à d’autres cette chance de croire en Dieu. Vouloir plus, c’est se garantir une réponse comme : « là-dessus, nous t’entendrons une autre fois. »
Une image qui peut nous aider. L’évangélisateur est comme un sourcier dans un désert brûlant, qui auraient découvert une source cachée et intarissable d’eau vive. Annoncer Jésus Christ, c’est tout simplement vouloir faire connaître cette source pour le plus grand bonheur de tous. Aux proches comme aux lointains, à nos enfants, à nos amis, à nos familles. Mais cela n’est pas simple. Nous le savons, car la foi est un don et il appartient à chacun d’accueillir librement ce don.
Pour beaucoup de nos contemporains — et je le vois notamment en accueillant des fiancés ou de jeunes parents — Dieu est méconnu, sinon ignoré, et c’est là la plus grande des tragédies pour l’humanité, car elle est alors orpheline et sans direction, vulnérable à toutes les passions, aux idéologies les plus meurtrières, car elle est sans espérance. Jésus, en nous envoyant dans le monde, nous rappelle que nous avons la responsabilité de nos frères et sœurs en humanité. Comme le soulignait le pape Jean-Paul II, « celui qui a vraiment rencontré le Christ ne peut le garder pour lui-même, il doit l’annoncer. »
C’est pourquoi Jésus, lui le Prince de la Paix, nous envoie comme des agneaux et non comme des loups, nous invitant à marcher avec audace mais aussi avec humilité avec tous ceux et celles que Dieu met sur notre route, afin qu’ils puissent reconnaître cette réalité fondamentale de l’existence humaine : c’est en Dieu que reposent toutes nos joies, tous nos bonheurs et toutes nos amours, Voilà ce que nous ne pouvons taire, car comment pourrions-nous cacher la joie qui nous habite? Puisse le Seigneur nous donner en cette eucharistie l’audace et le discernement nécessaire pour bien témoigner de lui, spécialement durant cette période propice de l’été.
Père Rémy CROCHU
HOMELIE-03-07-2022-JMPPère Jean Michel POUPARD