« Nous voudrions voir Jésus. » C’est la demande de gens d’origine grecque s’adressant aux apôtres : « Nous voudrions voir Jésus. » On assiste alors à une scène assez intéressante. Philippe en parle à André qui en parle à son tour à Jésus. Rien d’anecdotique là-dedans. Dans cette mission de porte-parole, nous pouvons en effet reconnaître la mission même de l’Église. L’Église est un porte-parole. Cette mission marche dans les deux sens : 1) une Église « porte-parole de Dieu » à l’écoute de la vie et des interrogations des hommes en recherche et qui leur témoignent de ce que le Seigneur a fait dans notre propre vie de chrétiens ; 2) et une Église « porte-Parole des hommes » qui porte à l’oreille de Jésus les appels des hommes, en les aidant à trouver les chemins pour les conduire à lui.
Nous avons beaucoup à méditer sur cet évangile, sur cette mission fondamentale de l’Église dont la raison d’être est bien de cet ordre : servir la rencontre avec Jésus, le donner à voir et aimer.
« Nous voudrions voir Jésus. » Qu’est-ce que les grecs de l’Évangile de ce jour étaient venus chercher, et pourquoi ils étaient venus le chercher ? Nous n’avons pas de précisions sur ce point mais nous pouvons imaginer qu’ils ont été sensibles à des récits divers de personnes rapportant des paroles de Jésus, montrant les signes d’une guérison, d’un pardon, et d’un bonheur retrouvé. Ils ont dû croiser la route de gens dont la vie avait changé, dont l’espérance avait été réveillée. Bref, ils ont rencontré des témoins contagieux.
Ce dont les hommes ont besoin, aujourd’hui pas moins qu’hier, c’est de croiser la route de témoins joyeux et renouvelés, capables de susciter par leur vie et leur exemple la certitude de la Présence agissante de Dieu, capables de réveiller l’espérance des plus désespérés !
Un jour, j’ai reçu la lettre d’un jeune. Il me racontait que, dans une vie désespérée, il n’avait pas encore fait l’expérience de Dieu. Puis, il ajoute (je le cite) : « Un soir j’ai raconté mes histoires à Sainte Thérèse. C’est facile de parler à quelqu’un qui n’existe peut-être plus. En tout cas, poursuit-il, le lendemain en allant au travail, elle m’a apparemment répondu. Je suis tombé sur une phrase du genre “Dieu est amour” collé sur un lampadaire. » Et il termine sa lettre en me disant : « Dieu est amour, et alors ? Tant que je ne suis pas en état de comprendre ce que cela signifie, rien ne peut changer, et je ne sais pas ce qu’il faudrait faire pour être en “état de comprendre”. » Et il termine son courrier par ces mots : « Mais pourquoi te raconter cela ? » Mon cœur a bondi en le lisant : « Mais parce que tu es travaillé par l’amour même de Dieu, pardi ! ». Philippe et André ont dû faire ce constat : L’Esprit-Saint les avait précédés dans le cœur de ces chercheurs de Dieu ! Et si ces païens « cherchaient » Jésus, c’était qu’ils l’avaient en quelque sorte déjà trouvé !
Dans la lecture de Jérémie, comme en écho, nous entendions tout à l’heure cette promesse de Dieu : « Personne ne dira plus à son frère : “Apprends à connaître le Seigneur !” Car tous me connaîtront, du plus petits aux plus grands, déclare le Seigneur. » Nous devons croire que Dieu nous précède toujours. Notre mission n’est donc pas plus que de proposer des lieux de rencontre avec le Christ. Nous les connaissons : la prière et les sacrements, la vie fraternelle et le service, l’enseignement et le témoignage. « Nous voudrions voir Jésus. », disent les grecs venus à Jérusalem. Il nous revient, chacun, de répondre à nos contemporains en recherche : « Tu cherches Dieu ? Il est au dedans de toi, il est au-dedans de tous ceux qui le cherchent et ouvrent leur cœur à sa présence. C’est là qu’il t’attend toi aussi, là que tu peux à ton tour le rencontrer ! »
Père Rémy CROCHU, curé