« Tu n’es pas loin du royaume de Dieu. ». Cette conclusion de Jésus, nous aimerions bien pouvoir la prononcer — et nous le faisons sans doute intérieurement, bien souvent — en pensant à telle ou telle personne de notre entourage qui donne le témoignage d’une vie donnée, généreuse : « Il n’est pas loin du royaume de Dieu, celui—là, celle-là. » Nous côtoyons des gens, en effet, qui, tout en ayant tourné le dos à une pratique chrétienne ou simplement n’en ayant pas même reçu l’éducation, vivent selon des valeurs, des règles de vie qui font notre admiration : le respect, la bienveillance, le service, la solidarité avec les plus pauvres, le sens de l’écoute…

On pourrait attribuer au scribe de l’Évangile ces qualités. C’est un homme soucieux de développer les valeurs de sa foi juive, les fameux « commandements » dont il se demande lequel est « le plus grand »…

« Tu n’es pas loin du royaume de Dieu. ». Cette réponse de Jésus sonne comme un éloge : tu es bien plus avancé dans ta recherche que beaucoup de tes contemporains. Néanmoins, il y a dans ce « pas loin » un petit quelque chose d’insatisfaisant. Quand Jésus dit : « pas loin », on peut en effet l’entendre comme « à la porte » : « tu n’es pas encore entré dans le royaume de Dieu, tu n’es parvenu que sur le seuil ». Comme si ce scribe était face à quelque chose de formidable mais que, tout en jetant un coup d’œil à l’intérieur, il n’osait pas encore faire le pas pour entrer.

« Faire le pas ». Jésus lui laisse la décision de le faire. Il ne force pas sa liberté d’entrer ou de rester à « lécher la vitrine ». Combien de fois ai-je entendu cette parole, à l’issue d’un baptême, d’un mariage, d’une messe ou d’une simple discussion : « ça donne envie »… Sans que, pour autant que je le sache, la personne ait donné suite…

C’est que la marche est haute ! Le scribe sait bien que se prononcer pour Jésus, c’est prendre le risque de « changer de camp » aux yeux de ses amis qui désormais le regarderaient comme un traître. Si l’époque a changé 20 siècles plus tard, il n’est pas facile, en public, de se déclarer chrétien. Il est bien plus à la mode de dire, au mieux, qu’on partage les « valeurs chrétiennes », sans trop savoir ce que cela représente en vérité, sinon qu’une vague sympathie pour les autres, surtout s’ils sont d’accord avec nous !

Quand Jésus rencontre le scribe, dans l’évangile de Marc, il est à la veille de sa passion. Et nous savons ce qu’il lui en coûtera de prendre le parti de l’amour radical de Dieu et du prochain. « Faire le pas », pour Jésus, c’est consentir à traduire en actes concrets ce qu’on proclame de sa bouche : aimer Dieu et le prochain de tout son cœur, de toutes ses forces. « Faire le pas », c’est se laisser inspirer (au sens fort du terme) non par des intérêts personnels et égoïstes mais par l’amour de Dieu et des frères en Dieu.

En ce sens, l’évangile d’aujourd’hui vient demander à chacun de nous où il en est vraiment : devant la porte, ou déjà entré ?

Les Saints que nous fêtons demain sont ceux qui donne ce témoignage de personnes qui ne sont pas restés dehors. C’est aussi le témoignage que donnent des nouveaux convertis. C’est le témoignage de personnes qui demandent le sacrement due la réconciliation, non pour dresser la liste de leurs torts mais pour se laisser toucher au cœur par l’amour de Dieu qui, à travers la parole du prêtre, leur redit qu’il les aime et les pardonne. Chers amis, ne restons pas sur le seuil !

Les commentaires sont fermés.