Lire l’évangile de ce dimanche.
Voici une promesse de Bonheur ! Cette page des béatitudes a résonné à travers les siècles comme l’une des plus belles pages de l’évangile, jusqu’à constituer un repère, une feuille de route, non seulement pour les chrétiens mais aussi pour d’autres gens qui y ont vu une promesse universelle faite aux hommes de bonne volonté : la revanche des faibles ! Bonheur pour les pauvres, pour ceux qui pleurent, pour les doux, pour les affamés et les assoiffés de justice, pour ceux qui pardonnent, pour ceux qui ont le cœur pur, pour les artisans de paix ; et enfin le bonheur pour les persécutés, spécialement ceux qu’on persécute pour leur foi. « Réjouissez-vous, soyez dans l’allégresse, car votre récompense est grand dans les cieux ! »
Cette promesse de bonheur est offert à ceux qui ont achevé ici-bas leur route pour la continuer dans la vie éternelle, ceux que nous appelons les Saints du Ciel et que nous fêtons à la « Tous-saints » où cette même page de Saint Mathieu nous est lue.
Aujourd’hui, les Béatitudes nous sont à nouveau proposées alors que nous commençons depuis quelques semaines le cycle du temps ordinaire et que nous méditons des textes qui se situent au début des évangiles, au début du ministère public de Jésus. Les Béatitudes constituent comme son « programme » spirituel, une promesse de bonheur pour tous ceux qui, en Israël, y aspirent. On se souvient de l’avoir déjà entendu dans le Cantique de Marie, à la Visitation : « Mon âme exalte le Seigneur : tous les âges me diront bienheureuse. Sa miséricorde s’étend d’âges en âges sur ceux qui le craignent, il élève les humbles, il comble de bien les affamés, il relève Israël son serviteur, il se souvient de son amour ». Que personne ne se laisse tromper, pourtant. Marie entonne son cantique dans un temps particulièrement difficile pour elle et pour tout un peuple. Elle vit dans une époque troublée, dans un pays occupé, persécuté depuis des générations, humilié, écrasé par la domination romaine, laquelle écrase toute forme de rébellion et que l’on craint. C’est donc un grand désir de salut, de paix, de liberté parcourt ce peuple qui, sur le mont des Béatitudes, écoute Jésus lui parler et lui promettre : « votre récompense est grande dans les cieux ! ».
Souvent, j’entends des personnes qui se résignent : « ce monde ne veut pas de nous ? Nous ne voulons pas de lui ! » et qui mettent leur espoir dans une vie meilleure dans l’au-delà, dans l’éternité qui les attend après la mort. Il est vrai que le bonheur, ce désir profond qui nous habite, ne trouve pas facilement son chemin dans notre cœur. Il est vrai que nous avons facilement l’occasion de nous plaindre en cherchant des coupables : nos gouvernants, le « système », les riches, les jouisseurs ; quand ce n’est pas l’Église même ou ses prêtres…
Nous oublions Jésus qui, dans son humanité, a dû faire face à cette même réalité. S’est-il plaint d’Hérode, de Rome ou de Judas ? A-t-il cherché à fuir ce « monde » dans des endroits plus calmes, ou dans le confort de Nazareth, ou dans la prière, ou dans la mort ? Non. Jésus ne s’enfuit pas. Il aura cette audace et ce courage de ne jamais céder à la plainte facile. Et inlassablement, il fera face, en n’opposant aux violents de toutes sortes que les armes de l’amour, du pardon. Jour après jour, et jusqu’à la mort ! Le Christ ne s’est pas trompé d’ennemi. Or, son Ennemi, c’est le Mal dont il est venu nous délivrer. À longueur d’évangile, « il fait justice aux opprimés, il donne le pain aux affamés, il ouvre les yeux des aveugles, il redresse les accablés, il protège l’étranger, il soutirent la veuve et l’orphelin », comme le chantait le psaume à l’instant (Ps 145). De ce point de vue, Jésus est le premier destinataire des béatitudes, le premier à les vivre, une à une. Viendront bientôt, après lui, tous ceux qui vivront courageusement au moins l’une des béatitudes, et ils seront heureux. Pas seulement heureux au ciel, mais aussi et déjà sur la terre. Et nous croisons parfois encore aujourd’hui ces gens profondément heureux, alors-même qu’il traversent de épreuves. Sophonie dans la première lecture parle d’eux quand il écrit : « Je laisserai chez toi un peuple pauvre et petit ; il prendra pour abri le nom du Seigneur. Il pourra paître et se reposer. »
Beaucoup dans ce monde se demandent comment faire pour être heureux. Un autre psaume leur répond : « Mets ta foi dans le Seigneur, compte sur lui, repose-toi sur lui, et tu verras : il agira et te comblera plus que les désirs de ton cœur » (Ps 36, 3-4). Alors, oui, tu connaîtras le bonheur !
Père Rémy CROCHU
HOMELIE-DU-29-01-2023Père Jean Michel POUPARD