On l’appelle souvent « La parabole des deux fils ». Je vous suggère, pour être plus exacts, de rebaptiser cette parabole : « la parabole des 3 fils ». Vous hésitez ? Vous avez sans doute raison à première vue. L’histoire évoque bien « deux fils ». Mais faut-il toujours faire confiance aux évidences ? Menons ensemble l’enquête !
Le fils cadet
C’est le premier personnage de la Parabole. Il est l’image de l’homme de tous les temps qui finit par s’éloigner de Dieu. De l’homme qui veut s’émanciper, devenir maître de son destin, jusqu’à renier ses origines. Chez nos contemporains, transposé au plan spirituel, c’est le drame des hommes qui vivent sans source ni ressources spirituelles. Le drame des orphelins de Dieu ! Jusqu’à éprouver la grande souffrance du vide de leur existence. Je connais un jeune père de famille qui explique que dans les jours qui ont précédé sa conversion aux JMJ, il s’était « senti vide », terriblement vide, juste avant qu’il ne se sente brutalement « plein », joyeusement plein, dans une soudaine expérience intérieure de la présence de Dieu en lui. Alors qu’il était dans l’état du Fils cadet qui, « rentrant en lui-même » se remet à penser à son père, il avait fait l’expérience soudaine de la miséricorde de Dieu venant à sa rencontre et le serrant sur son cœur, le couvrant de baisers, sans lui adresser le moindre reproche. Certains d’entre nous se reconnaîtront en lui.
Le fils aîné
Mais le Fils aîné nous ressemble peut-être davantage que le premier. C’est celui qui pense qu’il est resté fidèle puisqu’il est resté sagement à la maison. C’est le « bon chrétien », celui qui a coché toutes les cases ! Il n’a pas couru les filles, il s’est peut-être marié avec une fille comme il faut, il a été honnête dans sa vie… C’est un homme bien et ses parents sont fiers de lui à qui, le jour venu, le domaine familial sera confié ! Mais comment est son cœur ? En déplorant le cœur trop sensible de son père — « tu as tué le veau gras pour le sans-cœur que voilà ? » —, il révèle le sien : un cœur plein d’orgueil. Il n’y a pas (ou pas assez) d’amour fraternel dans ce cœur. Il dit qu’il aime « tout le monde », mais secrètement, il se dit : « il y a des limites, quand même ! ». Comme nous lui ressemblons ! Or, Dieu n’a pas tant besoin auprès de lui de « sages et de savants » que de « tout-petits » (Cf. Mt 11, 25).
Et le « 3ème fils », alors ?
Il n’est pas nommé explicitement, j’en conviens, mais il n’en est pas moins présent. C’est celui dont Saint Paul dira qu’il est « le fils aîné d’une multitude de frères » (Rm 8, 28). C’est le Fils par excellence, c’est Jésus, qui, par sa vie et par sa mort, nous a rappelé que nous avons tous un Père et des frères à aimer ! Nous avons en lui le guide infaillible pour ne pas « être mort » comme l’un et l’autre frère de la parabole, pour « revenir à la vie ».
Père Rémy CROCHU