Ce dimanche est vraiment celui de la Parole. La première lecture nous rapporte en effet ce qui se passe quand, après un siècle de déportation à Babylone, le peuple hébreu revient enfin à Jérusalem et ouvre les rouleaux de la Parole. Puis l’Évangile nous parle de Jésus qui revient à Nazareth pour faire de même.
L’un des grands changements du Concile Vatican II est d’avoir restauré une lecture plus abondante de la Bible. De sorte qu’à la messe, particulièrement, on s’est mis à « ouvrir plus largement les trésors bibliques pour que dans un nombre d’années déterminé, on lise au peuple la partie importante des Saintes Écritures » (SC 51).
Une grande avancée a consisté à mettre en résonnance les textes entre eux. C’est bien le cas aujourd’hui entre le livre de Néhémie et l’Évangile : le premier nous prépare en quelque sorte au second où nous voyons Jésus comme un nouvel Esdras, expliquant le sens des Écritures.
Nous venons d’accueillir un nouveau Missel. Il s’agit du livre dans lequel est présenté tout le rite, complémentaire du livre des lectures (le lectionnaire). Mais le Missel est lui aussi inspiré à 80% des Écritures : les oraisons, les hymnes, les prières de toute sorte. Même les gestes ou les symboles sont inspirés de la Bible : une aspersion, une invitation à se mettre à genoux, une bénédiction… Sans parler des chants qui croisent le rite et qui sont souvent d’inspiration biblique. Ainsi, la liturgie toute entière nous plonge dans la Bible et nous fait découvrir la saveur des Écritures.
Cependant, il ne s’agit pas seulement, ni même d’abord, d’enrichir notre culture biblique. La liturgie nous fait entrer en dialogue d’amitié avec Dieu. Le Christ est présent à son Église lorsqu’on lit les Écritures : c’est lui qui parle et qui enseigne, lui qui console et guérit ; comme dans l’évangile d’aujourd’hui, il est l’accomplissement des Écritures : « Aujourd’hui s’accomplit ce passage de l’Écriture que vous venez d’entendre ». Il est la Parole de Dieu faite chair. C’est ce que comprendront les disciples d’Emmaüs : « Commençant par Moïse et tous les prophètes, Jésus ressuscité leur expliqua dans toutes les Écritures ce qui le concernait » (Lc 24, 27). L’homélie du prêtre doit pouvoir se comprendre alors comme un moyen liturgique pour nous conduire à la rencontre avec le Christ toujours vivant, toujours présent au milieu de son peuple.
Mais la liturgie n’est pas à sens unique. À Dieu qui leur parle, les fidèles répondent par leur propre parole d’hommes. C’est le sens de la Prière Universelle. Mieux, c’est toute leur vie — ce qu’ils font et ce qu’ils sont — qu’ils offrent à Dieu, en forme de prière ou en forme de louange. On le voit bien dans la première lecture d’aujourd’hui où on nous dit que le peuple, debout, les mains levées, acclame le livre en disant : « Amen ! Amen !
Certains ont pu comprendre que la liturgie de la Parole préparait la liturgie de l’eucharistie. La vérité, c’est que tout se tient : et la parole méditée et la Parole mangée. Il n’y a qu’un seul acte liturgique où la « table de la Parole » est étroitement liée à la « table de l’eucharistie », jusqu’à n’en faire plus qu’une. Demandons au Seigneur de nous donner le goût de le chercher, dimanche après dimanche dans la méditation des Écritures et la joie de l’y rencontrer vraiment, jusqu’à vouloir le manger !
Père Rémy CROCHU