Homélie du 16 janvier 2022

(Image extraite du Missel pour les enfants)

De l’eau changée en vin. Et qui plus est à profusion : 600 litres ! Tel est le premier miracle — le premier signe, dit Saint Jean — accompli par Jésus pour ouvrir le temps de sa mission.  Sa mission ? Elle est en effet toute contenue, ici : « Changer l’eau de la vie ordinaire en vin de la vie éternelle. » (Emprunt au livre d’Adrien Candiard, o.p., « Veilleur, où en est la nuit ? », 2017)

La vie ordinaire ; la vie éternelle. C’est bien de cela qu’il s’agit. En Jésus, Dieu vient rencontrer notre vie ordinaire pour la changer en vie éternelle.

Les temps dans lesquels nous vivons n’ont rien de très différent des temps évangéliques. On se préoccupait hier du manque de vin — sans doute une erreur bête de calcul de la part de l’intendant ou du maître du repas qui n’avaient pas pensé qu’on boirait autant ce jour-là — et quelque chose de la noce allait être gâché, pensait-on. Aujourd’hui encore, le monde dans lequel nous vivons est inquiet et préoccupé. Il faut le reconnaître, ce sont souvent des inquiétudes très égoïstes : le manque de ceci, la frustration de n’avoir pas cela. Nous avons de nombreux exemples dans les inquiétudes que nous rapporte l’actualité quotidienne. Mais il y a de légitimes inquiétudes qui traversent notre époque et auxquelles le manque de vin à Cana peut nous faire penser : les questions écologiques où l’homme use et abuse du don de Dieu, ou bien les troubles profonds d’une société qui manque d’espérance et se laisse tenter par le repli sur soi. Et que penser d’une proposition de la foi et de l’évangile qui semble n’avoir plus le même écho que par le passé, dans le cœur de nos contemporains…

Pourtant, si nous partageons, nous chrétiens, cette inquiétude, elle se croise avec — espérons-le — l’immense confiance de Marie, se tournant vers son Fils : « Ils n’ont plus de vin… ». Seigneur, nous sommes inquiets, oui ; mais nous croyons que tu peux tout, même l’impossible.

Comme pour me convaincre de cela, j’ai fait cette expérience à plusieurs reprises ces derniers temps de personnes — des jeunes et des adultes — qui, à la grande surprise de leur entourage, ont entamé un chemin de retour à la foi : un adolescent qu’on surprend à lire quotidiennement la Bible ; un homme mûr qui choisit de lâcher de vieilles et mauvaises pratiques et reprend le chemin de l’Église ; un autre qui se rend compte de tout ce qu’il a reçu et du peu qu’il a encore donné aux autres ; plusieurs couples de fiancés qui nous disent que la préparation de leur mariage les a relancés dans leur foi…

« Toi, tu as gardé le bon vin jusqu’à maintenant ». L’espérance chrétienne s’enracine dans la conviction de l’éternel présent du Jour de Dieu, un Jour qui a connu son aube nouvelle à la Résurrection et qui continue de se lever dans les cœurs ouverts. Le « maintenant » de Dieu peut transformer une vie comme l’eau d’hier a été changée en vin de noces. De même que la joie avait rempli le cœur des serviteurs du banquet de Cana — « eux qui avaient puisé l’eau » et qui « savaient donc d’où venait ce vin » —, de même, réjouissons-nous de ce que Dieu nous donne la grâce de voir plutôt que de nous laisser décourager par ce qui va mal.

Plus que jamais, demandons au Seigneur que le miracle de Cana continue de s’accomplir. Seigneur, change l’eau de notre vie ordinaire en vin de la Vie éternelle !

Père Rémy CROCHU

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