La tentation de Jésus au désert

Saint Marc nous rapporte aujourd’hui sa version — très brève — des tentations de Jésus au désert. Il me semble intéressant de comprendre que cet épisode, qui ouvre le temps de la vie publique de Jésus, est une sorte de résumé de sa mission : le désert représente le monde dans lequel il a été envoyé et dont il va sortir par la résurrection ici symbolisée par les anges venus le servir. Et, si ce récit symbolise la vie de Jésus, il symbolise aussi notre vie d’hommes. Une vie d’hommes qui se laissent conduire par l’Esprit-Saint, et qu’on peut décrire par trois grandes dimensions : vivre au désert, monter vers Pâques et sortir proclamer l’Évangile.

1) Vivre au désert

L’évangile de ce jour nous parle d’un désert où Jésus est allé pour 40 jours symboliques. Là, le démon lui mène la vie dure. Ce récit suggère ainsi nos propres itinérances, nos propres traversées du désert, notre combat du quotidien contre toutes sortes d’ennemis, notre combat contre le Mal. Combattre mais consentir à rester et faire face, là où tant de nos contemporains sont tentés de chercher à fuir ce monde présent par tous les moyens.

Mais ce désert est aussi, pour le chrétien éclairé par la lumière de l’Esprit-Saint, le lieu même de l’expérience intime de la présence de Dieu, comme la fleur qui pousse sur le fumier dont elle se nourrit. Le Christ a lui-même fait cette expérience au long de sa vie terrestre et ultimement dans sa Passion.

2) Monter vers Pâques

Nous ne sommes pas faits pour rester dans le désert. Pas plus que que Jésus qui sortira vainqueur du désert mortel de sa pâque par sa résurrection et sa victoire définitive sur le Mal. Nous ne sommes pas condamnés à errer sans but : nous sommes prédestinés à la joie de Pâques. L’acteur par excellence de cette transformation est d’ailleurs mentionné par l’Évangile : l’Esprit Saint, Celui qui conduit nos pas vers la Vie (qui n’a rien à voir avec la survie que nous propose ce monde !).

3) Sortir proclamer l’Evangile

Seul celui ou celle qui a pris le risque du désert et qui a, par l’Esprit, choisi de tendre vers Pâques, lui seul peut prétendre être un témoin de l’Évangile. C’est bien ce que Jésus fera à son retour du désert : il annoncera la victoire promise de la joie sur la tristesse, de la paix sur la peur, de la vie sur la mort. C’est ce qu’il fait plus encore depuis le matin de sa résurrection en se manifestant à nous et en nous montrant ses plaies cicatrisées.

Ce Carême est placé sous le regard bienveillant de Saint Joseph. Comment ne pas voir en lui une parfaite incarnation de ce triple mouvement : Joseph a consenti au désert en prenant Marie chez lui et en devenant le protecteur de Jésus enfant ; il communiera à la pâque de son Fils en donnant sa vie pour lui, jusqu’au sacrifice de voir son heure ; et, s’il n’a pu sur terre sortir proclamer l’Évangile, il continue de le faire à travers son seul nom accroché au fronton des églises, des écoles, des institutions « Saint Joseph » !

Le temps du Carême n’est vraiment pas un temps de désert où il ne se passe rien. C’est le temps de l’expérience intime d’une terre certes agitée, mais aussi habitée et animée — au sens fort du terme — puisque nous y aurons découvert l’Esprit de Vie à l’œuvre, nous invitant à croire dans la victoire de la Vie sur la mort.

Père rémy Crochu, curé.

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