La Confirmation

Nous allons recevoir l’évêque pour qu’il donne aux jeunes du Doyenné de Châteaubriant le sacrement de la Confirmation. C’est sans doute le sacrement le moins connu. Pas forcément le moins aimé (je pense ici au sacrement du pardon) mais certainement le moins connu. Il reste dans la mémoire des plus âgés comme celui du passage de l’évêque qui, dans l’ancien rite, donnait une gifle symbolique dont ils se rappellent avec amusement. Sans oublier la fête familiale qui s’en suivait. L’un des rites de passage, avec la première communion ou la profession de foi. Une étape solennelle dans le parcours d’une vie chrétienne d’enfant.

Lorsqu’on interroge sur le sens donné à la Confirmation, beaucoup répondent qu’il s’agit de « confirmer » son engagement à être chrétien. Bien plus que « d’être confirmé » dans sa foi par la grâce de Dieu. Et nous avons souvent constaté que la Confirmation était, pour de nombreux jeunes, l’ultime étape avant un éloignement plus ou moins définitif de l’Église, voire parfois un rejet total de la foi…

L’évangile ne parle pas explicitement de la « Confirmation ». Du moins comme il peut le faire du baptême, de l’eucharistie ou du pardon. Mais c’est oublier que ce sacrement s’enracine dans la grâce de Pentecôte, indissociable de la fête de Pâques. Indissociable, car l’expérience des apôtres, puis des premiers convertis, est celle d’une Vie Nouvelle qui les plonge non seulement dans la connaissance du Christ et de son amour pour nous, mais qui les remplit de sa Présence et de son élan qui les poussent à témoigner autour d’eux : oui, Dieu m’aime et je trouve ma joie en lui : « Venez voir un homme qui m’a dit tout ce que j’ai fait, ne serait-il pas le Messie ? », dit de Jésus la Samaritaine à ses compatriotes (Jn 4, 29).

Depuis quelques temps sur la paroisse, nous recevons la demande d’adultes à être confirmés. En réalité, ils ne demandent pas d’abord ce sacrement. Ils viennent avant tout chercher à mettre des mots sur une expérience intérieure naissante et inattendue. L’un aura été touché jusqu’aux larmes par la préparation au baptême de son enfant, l’autre par la paix d’une église, un autre encore par une épreuve familiale qui l’a poussé à chercher une issue de secours… Je suis enthousiasmé par leur capacité d’émerveillement et de perception de l’action de Dieu dans leur vie. Pas seulement l’émotion que génère une écoute attentive, un accompagnement fraternel, la rencontre d’une communauté vivante. Non. Il s’agit manifestement de plus que cela : la perception d’une Présence cachée, nouvelle, qui s’invite à l’intérieur et qui peu à peu me redonne goût à la vie, la mienne et celle des autres. Rien de bien différent de ce qu’ont pu vivre de nombreux convertis dont l’histoire de l’Église est jalonnée.

Pour nous qui sommes « tombés dans la religion » comme Obélix dans la potion magique dès le berceau, nous peinons à penser les sacrements de l’initiation chrétienne autrement que des dates ponctuant notre enfance. Un adolescent vient me trouver ces derniers temps et m’interroge : « quand vous avez été confirmé, qu’avez-vous ressenti ? » Pour autant que je me souvienne : rien ! Au même âge, j’avais suivi le mouvement et j’avais certainement vécu une bonne journée. C’était tout. Cependant, je peux dire aujourd’hui que j’ai été nourri et que je continue de l’être quotidiennement par la grâce de ce sacrement, par cette effusion de l’Esprit-Saint qui m’a peu à peu ouvert les yeux du cœur sur l’action invisible de Dieu, réalité qui échappe à qui regarde les choses sans s’ouvrir à lui. Peu à peu, j’ai appris à reconnaître, dans les joies mais dans les épreuves aussi, la vraie valeur des choses, des personnes, la portée des événements les plus insignifiants. Une déception pouvant devenir une grâce, tout autant qu’une rencontre, qu’un imprévu, qu’une coïncidence.

Tout, une vie entière, peut devenir une Pentecôte, pour qui sait l’accueillir ainsi : non comme une date du passé mais comme une grâce pour aujourd’hui. Pentecôte, c’est aujourd’hui !

Père Rémy

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