La sainteté en option ?
Nous nous apprêtons à fêter la Toussaint. On l’appelle parfois « la Pâque de l’automne » du fait qu’on y célèbre ceux qui sont déjà ressuscités et qui vivent auprès de Dieu. Mais connaissons-nous l’origine de cette fête ?
Au IVe Siècle, en orient, on célèbre le lundi de Pentecôte « les saints martyrs ». Et cette tradition demeure dans les églises orthodoxes aujourd’hui encore. En Occident, une fête de « Toussaint » apparaît au Ve siècle à une date qui varie, jusqu’à ce qu’elle finisse par se fixer au 1er novembre au VIIIe siècle, sous le pontificat de Grégoire IV, et s’impose dans tout l’empire carolingien.
Une tradition celte irlandaise (la fête de Samain) ou anglo-saxonne (la fête d’Halloween) existait qui célébrait l’ouverture vers « l’autre monde » et les premiers moines bretons ont certainement cherché à imposer une autre tradition (la Toussaint) pour supplanter la première.
C’est seulement à partir du IXe siècle que, sous l’influence des moines de Cluny, une « fête des trépassés » est instituée le lendemain, le 2 novembre de chaque année, et cette pratique entrera en vigueur dans le calendrier liturgique universel à partir du XIIIe siècle, sous le titre que nous connaissons encore aujourd’hui de « commémoration de tous les fidèles défunts ».
La Toussaint est donc, comme son nom l’indique, l’occasion « d’honorer tous les saints en une seule et même fête » (comme le dit le Missel Romain). Le lendemain étant une sorte de prolongement, nous incitant à prier pour que nos « trépassés » entrent eux aussi, par la miséricorde de Dieu, dans la vie éternelle.
Les traditions sont parfois difficiles à changer et c’est sans doute pour cette raison que le culte des morts reste massivement encore célébré le 1er novembre et non le 2, faisant de la Toussaint une fête triste et douloureuse, là ou l’Église nous invite au contraire à nous réjouir de voir tant de frères et sœurs parvenus à la joie éternelle.
Il est évident cependant que, le seul jour férié étant le 1er novembre, les familles se rassemblent ce jour-là et non le 2 sur la tombe de leurs disparus. C’est ce qui nous conduit nous-mêmes à proposer un temps de prière pour les défunts. Par souci de cohérence liturgique et aussi d’accord avec les pratiques des paroisses voisines, nous avons décidé cette année de distinguer les événements. Les messes de Toussaint sont fixées comme un dimanche : messe de la veille et messe du jour. La commémoration des défunts est anticipée par un temps de prière proposé à 15h dans toutes les églises où cela peut se faire, suivie d’un temps au cimetière pour ceux qui le souhaitent. C’est dans ce cadre que la liste des défunts de l’année sera lue.
S’agissant de la Toussaint, il faut nous rappeler — et c’est le but de cette fête qui revient chaque année — que la sainteté n’est pas réservée à quelques âmes prédestinées mais qu’elle concerne tout le monde. Nous sommes tous prédestinés à être non pas des mi-vivants et encore moins des morts, mais des saints. Beaucoup sont tentés de jeter l’éponge : « je n’ai plus aucune chance d’y arriver ! » Ils ont bien tort de le penser ! Car la sainteté n’est pas la perfection à la force du poignet mais la conscience de la capacité de Dieu, et de Dieu seul, de nous élever à hauteur de sa Sainteté. C’est la sainteté du Bon Larron, c’est celle des saints connus ou inconnus, jusqu’à celle de ceux qui « ne poursuivent ni grand dessein, ni merveille qui les dépassent, mais qui tiennent leur âme égale et silencieuse, comme celle d’un petit enfant contre sa mère » (Cf. Psaume 130). Nous sommes tous des saints en puissance !
Père Rémy CROCHU