« J’ai désiré d’un grand désir manger cette Pâque avec vous avant de souffrir ! » (Luc 22, 15). Telles furent les paroles prononcées par Jésus en prenant place à la table de son dernier repas. Et, nous voici tous rassemblés autour de cette même table, chers amis. J’ai particulièrement sous les yeux ceux qui, de nos 2 paroisses, se préparent à communier pour la première fois et que nous avons spécialement conviés. Je pense aussi à vous qui, catéchumènes adultes ou jeunes adultes, ferez de même, cette année. Je pense bien entendu à chacun d’entre vous qui, venant de nos deux paroisses Saint Clair et Saint Guénolé, avez tenu à être là.
Pourquoi êtes-vous venus ? Il est vrai que ces célébrations de la Semaine Sainte sont un sommet de l’année liturgique. Mais je sais que vous n’êtes pas venus ce soir parce que « vous avez toujours fait comme ça » ou parce qu’on vous a poussés à venir ou encore pour satisfaire votre plaisir des yeux ou des oreilles ! Alors, pourquoi êtes-vous là ?
Sans prétendre répondre à votre place, je crois pouvoir dire que c’est avant tout parce que, mystérieusement, Jésus nous a lui-même conviés. Son « grand désir » évoqué en commençant est de nous plonger dans le mystère de sa Pâques, de nous introduire toujours plus profondément dans la compréhension de sa mort et de sa résurrection pour nous.
La messe n’est pas un spectacle auquel nous aurions à assister, pour finalement donner notre avis sur la qualité des chants ou la beauté du sermon ! Le pape François nous a récemment rappelé que la messe est l’action de toute la communauté des baptisés. « Je pense, dit-il, à tous les gestes et à toutes les paroles qui appartiennent à l’assemblée : se rassembler, marcher en procession, s’asseoir, se tenir debout, s’agenouiller, chanter, se taire, acclamer, regarder, écouter. Ce sont autant de façons par lesquelles l’assemblée, “d’un seul cœur” (Ne 8,1), participe à la célébration » (DD 52). Ces gestes et ces paroles liturgiques rencontrent, de messe en messe, notre vie quotidienne : un quotidien dans lequel nous accueillons ou nous sommes accueillis, nous pardonnons ou nous demandons pardon, nous nous rassemblons ou nous nous dispersons, nous nous rendons service, nous pleurons ou nous nous réjouissons… Prions pour que nos liturgies soient des lieux qui convertissent et transforment notre quotidien ! C’est bien là leur but. Priez aussi pour vos prêtres dont c’est la fête aujourd’hui. En présidant la liturgie, ils ont cette redoutable charge de vous conduire au Christ. Comme il leur est facile de chercher à être, comme le dit encore le pape François, « le centre de l’attention (…) pour le meilleur ou, malheureusement [parfois], pour le pire » (DD 54).
Il faut rappeler en effet ici que le centre de nos liturgies, c’est le Christ (et pas nos écrans !). Notre centre, c’est le Christ présent, vivant, à l’œuvre dans les cœurs. Chaque parole et chaque geste doivent servir ce but. Y compris les moments de silence. N’avons-nous pas mieux à faire que de disserter sur le choix d’un chant, la longueur d’une homélie, ou le respect de telle rubrique ? Le sourire d’un enfant, l’accueil des nouveaux, l’attention aux plus petits, la recherche d’une prière à l’unisson… N’est-ce pas cela l’essentiel ? Sans oublier Celui qui ne cesse de se rappeler à nous, comme en ce Jeudi Saint, lorsqu’il nous dit : « « J’ai désiré d’un grand désir manger cette Pâque avec vous avant de souffrir ! »
Père Rémy CROCHU