« Tu aimeras le Seigneur ton Dieu de tout ton cœur, de toute ton âme et de tout ton esprit. Voilà le grand, le premier commandement » (Cf. Mt 22, 34-40).
Qui sont les pharisiens qui interrogent Jésus ? Nous en connaissons tous au moins un : il s’appelle Saul, et il prendra bientôt le nom nouveau de Paul, suite à sa conversion. Paul se définit lui-même comme ayant été « pharisien » (Ph 3, 5), « nourri aux pieds de Gamaliel » (Ac 22, 3).
Les évangiles définissent les Pharisiens comme les farouches défenseurs de la Loi, de la Torah. Laquelle dit — rappelez-vous la première lecture extraite du livre de Moïse, l’Exode — : « Tu n’exploiteras pas l’immigré, tu n’accableras pas la veuve et l’orphelin, tu n’imposeras pas d’intérêts à qui tu as prêté de l’argent » (Cf. Ex 22, 20-26), etc. Et c’est encore dans un des livres de Moïse, le Deutéronome, qu’on trouve le verset cité par Jésus : « Tu aimeras le Seigneur ton Dieu, de tout ton cœur, de toute ton âme et de tout ton esprit » (Dt 6, 5). Les Pharisiens ne contestent pas la connaissance que pourrait avoir Jésus des Écritures, mais ils contestent l’interprétation qu’il en fait. Cette différence est non seulement importante à l’époque du Christ, mais elle dit quelque chose à chacun de nous qui oscillons, dans notre vie chrétienne, entre ces deux tendances, pharisienne ou chrétienne, ces deux manières de comprendre les Écritures.
Quelques exemples, pour illustrer cela, en m’appuyant sur les évangiles.
Pour le pharisien, ce qui compte pour être juste aux yeux de Dieu, c’est de faire ce qu’il faut faire et ne pas faire ce qu’il ne faut pas faire. Quitte à justifier ses actes par des versets de la Bible. Pour Jésus, ce qui compte, c’est l’intention du cœur, l’orientation fondamentale de nos intentions, malgré nos faiblesses, nos chutes. Pensez à la parabole du pharisien et du publicain (Luc 18, 9-14).
Pour le Pharisien, ce qui compte pour être juste aux yeux de Dieu, c’est de convaincre les autres, de défendre les lois et les bonnes mœurs, de défendre Dieu lui-même ! Pour Jésus, ce que Dieu regarde d’abord, c’est la valeur des personnes en deçà même de ce qu’elles auraient pu dire ou faire. Pensez à Marie-Madeleine, à Zachée ou au « bon Larron ».
Pour le pharisien, ce qui compte pour être juste aux yeux de Dieu, c’est de chercher à être parfait : c’est compter sur soi, sur soi seul. Pour Jésus, ce qui compte, c’est de savoir que « sans lui », sans l’Esprit-Saint, nous « ne pouvons rien faire » (Jn 15, 5).
Pour le Pharisien, ce qui compte, c’est de s’entourer de gens « qui pensent comme nous ». Pour Jésus, c’est de se faire l’ami des publicains et des pécheurs.
Pour le Pharisien, ce qui compte, c’est de se mettre en colère quand on leur fait des reproches. Pour Jésus, ce qui compte c’est de consentir à la croix et d’aimer ses ennemis.
La réponse de Jésus aux pharisiens se résume au double commandement : l’amour de Dieu et l’amour du prochain. Aimer l’un et l’autre « de tout son cœur, de toute son âme et de tout son esprit ». Aimer l’un et l’autre « comme soi-même ». Comme nous-mêmes nous nous savons aimés de Dieu. Sur ce sujet, je vous conseille, en rentrant à la maison, de relire la 1ère Lettre de Saint Jean. En voici un seul verset : « Celui qui aime est né de Dieu et connait Dieu, car Dieu et amour » (Cf. 1Jn 3, 7-8).
Rémy Crochu, curé.