Le récit de la passion nous plonge dans le mystère du Mal. Le mystère du combat du Christ contre le Mal. Le Mal se dissimulant derrière les différents personnages, à l’exception du Christ : la lâcheté et la tiédeur des apôtres ; les ambitions puis la trahison de Judas ; la violence des soldats, la jalousie et les manœuvres politiques des grands prêtres et du Conseil Suprême ; l’abus de pouvoir de Caïphe ; les foules versatiles qui sont du côté de celui qui gueule le plus fort ; la faiblesse morale de Pilate… Toutes les formes de tentation diabolique sont concentrées dans ce récit. Dans une paroisse, dans nos familles, n’allons pas imaginer que nous soyons à l’abri, immunisés. Mais ce que nous ne devons pas oublier, c’est celui qui se cache derrière tout cela. « La plus belle des ruses du diable est de vous persuader qu’il n’existe pas », écrit le poète Charles Baudelaire, dans un éclair de lucidité qui serait salutaire pour beaucoup de nos contemporains qui ne voient pas celui qui se cache derrière ceux qui font le mal.
Comme il est facile en effet de nous laisser piéger par celui qui nous inspire rancœur, tristesse, mépris, jalousie, envies égoïstes, suspicions… Ne soyons pas naïfs : il y en a “un” qui, déjà vaincu par le Christ, continue néanmoins de remuer la queue pour faire tomber le plus grand nombre et les entraîner dans sa chute mortelle.
Plus que jamais, notre Sauveur, c’est le Christ. Regardons vers lui et modelons alors nos comportements sur les siens, face à l’Adversaire : à la tiédeur des apôtres, il répond par sa patience ; à la trahison de Judas, il répond par son obéissance ; aux mensonges des chefs de prêtres, il oppose la vérité ; à ses accusateurs et leurs faux témoignages, il répond par son silence ; aux calomnies de la foule, il présente son dos ; aux insultes, son visage en sang ; à la violence, ses pieds et ses mains.
L’enjeu de la Passion du Christ est à ce niveau. On n’en est pas à se demander qui a raison ou qui a tort, mais à accepter de nommer celui qui se cache derrière le mal que font les hommes et à crier vers celui qui nous sauve, le Christ qui est mort pour que, par lui, nous ayons la vie.
Père Rémy CROCHU
HOMELIE-DU-24-03-2024Père Jean Michel POUPARD