« Aime, et fais ce que tu veux »
Voici l’été. Enfin ! Cet été : « Dilige, et quod vis fac » (« aime, et fais ce que tu veux »). Vous connaissez sans doute ce conseil de Saint Augustin (5ème siècle) et celui-ci pourrait être une belle source d’inspiration pour cette période qui s’ouvre et qui représente pour nous tous un temps, sinon de repos, tout du moins d’ouverture à d’autres horizons, à de la nouveauté.
Le problème est que cette petite phrase, sortie de son contexte, peut prêter à des interprétations qui contredisent l’intention de son auteur. Des interprétations qui prennent le verbe « aimer » dans un sens libertin et faisant dire à cette maxime que l’amour s’affranchit de toutes les lois, de toutes les règles. Et certains ne se gênent pas de l’utiliser pour justifier leurs excès, leurs comportements laxistes.
Saint Augustin, prononce cette sentence dans son commentaire d’une des lettres de Saint Jean, dans laquelle il parle de l’amour total et désintéressé de Dieu. Saint Jean écrit en particulier : « Voici comment nous avons reconnu l’amour : lui, Jésus, a donné sa vie pour nous. Nous aussi, nous devons donner notre vie pour nos frères » (1Jn 3, 16). Et alors, Augustin commente : « Aime et fais ce que tu veux. Si tu te tais, tais-toi par Amour ; si tu parles, parle par Amour ; si tu corriges, corrige par Amour ; si tu pardonnes, pardonne par Amour. Aie au fond du cœur la racine de l’Amour : de cette racine, rien de mauvais ne peut sortir. »
« Aime, et fais ce que tu veux » Voilà donc bien un conseil qui peut nous inspirer dans tout ce que nous avons à vivre en ce moment. Et nous pouvons l’appliquer à bien des situations que nous rencontrons ou rencontrerons dans les prochaines semaines.
On peut assez bien l’appliquer à cette période d’élections. Non pour exiger que se l’imposent nos politiques « à la racine » de leurs actes, mais pour nous l’imposer personnellement dans notre discernement de ce que nous aurons à décider le moment de déposer notre bulletin de vote dans l’urne étant venu. Quels seront en effet mes critères pour me décider pour (ou contre) tel ou tel candidat ? En tous cas, ce ne devrait pas être « parce que j’ai toujours voté comme ça » ou encore « parce que ce candidat me semble sympathique » ou encore « parce que ses idées sont proches des miennes ». La question fondamentale : est-ce que ce candidat (ou son parti) est au service de ses ambitions personnelles, de son maintien au pouvoir, ou bien au service désintéressé de ceux dont il aura la charge ? Rappelons ici que, pour un chrétien, l’engagement politique est une des plus nobles manières de vivre le commandement de l’amour : « tu aimeras ton prochain comme toi-même ». Le temps des élections passé, notre réception des résultats ne doit pas nous laisser céder à la tentation de l’amertume qui n’est jamais inspirée par l’amour. Bien au contraire : redoublons d’amour fraternel.
On peut aussi appliquer le précepte de Saint Augustin au domaine des missions ou des responsabilités qui nous sont confiées. Tu as reçu la mission de rendre service ? Tu as reçu la mission d’éduquer ? Tu as reçu la mission de former ? Tu as reçu la mission de prier ? Tu as reçu la mission de prendre soin ? Es-tu inspiré par un amour vraiment désintéressé ?
Père Rémy CROCHU