Un air de Coupe du Monde !
Ne riez pas. Ces dernières semaines, j’ai joué au rugby ! La journée proposée aux prêtres, lors du « Congrès Mission » du début octobre, et en pleine Coupe du Monde, s’est déroulée sur un stade nantais, là même où s’entraînent des équipes qui s’affrontent actuellement. Encadrés par des jeunes joueurs expérimentés, nous avons nous-mêmes été invités à faire l’expérience d’un véritable entraînement : échauffement, passes et réceptions, gestes techniques plus ou moins complexes… Jusqu’à nous voir proposer un match en miniature. Pour constituer les deux équipes, nos formateurs nous tendent des gilets de couleur en nous disant naïvement : « Avez-vous déjà porté une chasuble ? » Rires étouffés dans nos rangs. Jusqu’à ce que l’un des prêtres lance : « OK, on va faire deux équipes : ceux qui portent ordinairement des chasubles et ceux qui n’en mettent jamais » !
L’après-midi devait être consacré à la relecture de notre expérience du matin, en l’appliquant à notre ministère de prêtres : travail en équipe, répartition des missions, en particulier celle de capitaine ou celle de l’entraîneur — entendons celle du curé et de ceux qui assument avec lui la charge pastorale —, définition des objectifs — la vision pastorale —, communication, acquisition de compétences, prise de décision… Sans oublier la troisième mi-temps — la vie fraternelle ! Pour finir, je me suis arrêté sur cette curiosité que constitue le ballon avec sa forme si étrange qui lui vaut d’introduire une part non négligeable d’aléatoire, d’imprévu. Il nous renvoie à tout ce qui, dans la vie paroissiale, échappe à ce qu’on aurait pu prévoir, le meilleur comme le pire. Bref, vous l’avez compris : j’ai aimé cette journée !
Cette comparaison de la paroisse avec le rugby pourrait tout aussi bien s’appliquer à la vie familiale, à une école, ou à toutes formes de communauté saine,
dans lesquelles les membres ont des fonctions diverses et en constante évolution, et où une âme commune reste à conquérir et à entretenir afin de tenir le match et espérer atteindre ensemble le but ultime.
Évidemment, la figure du Christ, dans cette allégorie peut sembler très absente. Sans doute parce que nous ne le cherchons pas où il est, c’est-à-dire partout : dans la figure de chaque joueur comme dans celle de l’entraîneur et même celle de l’arbitre ; dans l’esprit d’équipe et l’engagement de chacun ; dans les victoires et dans les échecs ; dans la fatigue des corps et l’acuité des esprits ; dans les mêlées, les passes de côté et même les fautes et les pénalités, dans les essais enfin et leur transformation ! Tout peut nous parler de la victoire du crucifié et, avec lui et en lui, de notre propre victoire !
Certes, la vie n’est pas un jeu. Le terrain paroissial n’est pas un stade et encore moins une arène. Mais, au-delà de l’image du rugby, c’est bien d’un vrai combat dont nous parlons. Et les mots de l’apôtre Paul illustrent bien ce propos quand, s’adressant aux chrétiens de Philippe, il leur disait : « oubliant ce qui est en arrière, et lancé vers l’avant, je cours vers le but en vue du prix auquel Dieu nous appelle là-haut dans le Christ Jésus. En tout cas, du point où nous sommes arrivés, marchons dans la même direction. Frères, ensemble imitez-moi, et regardez bien ceux qui se conduisent selon l’exemple que nous vous donnons. Car nous, nous avons notre citoyenneté dans les cieux, d’où nous attendons comme sauveur le Seigneur Jésus Christ, lui qui transformera nos pauvres corps à l’image de son corps glorieux » (Ph 3, 14…20). Comment imaginer que Saint Paul, lui qui nous parle de but et de transformation, n’ait pas aimé regarder la Coupe du monde ?
Père Rémy