« Je n’ai pas le temps »
L’argument tient-il la route ? Nous prétextons souvent de ce manque de temps pour reporter au lendemain ce que nous aurions pu faire le jour même, voire y renoncer. Une visite, un service, la prière : « j’ai pas le temps » !
Le temps est une notion tout à fait relative. Nous savons tous le trouver quand nous devons faire face à une situation imprévue ou imposée. Cela peut nous coûter — comme d’attendre dans une gare le départ improbable de son train ! — mais nous savons que nous n’aurons pas le choix.
Trouver le temps, c’est savoir attendre, savoir gérer son temps et vivre dans l’instant présent.
Attendre. Cela n’a rien de naturel. C’est du reste une caractéristique de l’adolescence que de consentir à ne pas avoir « tout tout de suite » et enfin devenir ainsi un adulte. Attendre, c’est, pour nous chrétiens, se préparer maintenant dans la perspective de ce qui nous « attend » demain : « nous attendons ta venue dans la gloire ».
Gérer son temps. C’est bien là le problème : nous devons apprendre à gérer nos priorités. C’est évident que si nous papillonnons au gré de nos envies du moment (on appelle cela « procrastiner »), des choses vont nous échapper. Et il est un peu trop facile de dire (j’en sais quelque chose !) que, si des choses n’ont pu être faites, « eh bien, tant pis ! ». On parle de « l’ordre des choses ». Les choses ont en effet un ordre, elles demandent d’être ordonnées, organisées. Il n’est certainement pas inutile d’organiser son temps, de tenir un agenda (même en vacances !), de se lever en se demandant ce que l’on a à faire aujourd’hui, et non « un de ces jours »…
Vivre l’instant présent. Accueillir l’instant présent (« carpe diem ») n’est pas laisser les événements décider pour nous, nous laisser gouverner par eux. C’est tout autre chose. C’est donner de l’intensité à chaque instant, avec cette conscience vive que c’est là, et pas ailleurs, que Dieu est présent. C’est une qualité d’attention, une disponibilité, une capacité d’écouter qu’impose la circonstance. J’ai souvent été blessé par des remarques du genre : « tu n’a pas fait attention à moi » ou « qu’est-ce que tu peux être distrait ! ». Possible. Mais il est aussi vrai que personne ne peut être pleinement attentif, disponible, à deux endroits à la fois, à deux personnes simultanément. Je suis saisi de voir que Jésus, dans l’Evangile, est moins attentif aux foules qu’à des personnes en particulier. Il ne « zappe » aucune. Il semble vivre chaque rencontre comme si c’était la dernière fois qu’ils se voyaient, et cela change tout.
En cette fin d’été et au commencement d’une nouvelle année, « prenons le temps » de nous demander pourquoi il nous arrive de dire : « je n’ai pas le temps » !
Père Rémy CROCHU