La beauté de la liturgie
Fin juin, le pape François a proposé à toute l’Église une nouvelle « lettre apostolique » — Désiderio desideravi —en forme de longue méditation sur le sens profond de la liturgie. De quoi s’agit-il ?
Certainement pas d’un nouveau texte normatif pour dire comment faire ou ne pas faire. L’intention est claire : conduire le lecteur à « s’émerveiller de la liturgie » qui est « une dimension fondamentale pour la vie de l’Église ». J’avoue que, pour avoir commencé à la lire, cette lettre (qu’on peut facilement se procurer en librairie ou lire sur le site du Vatican) m’a aussitôt touché par sa profondeur.
« Desiderio desideravi ». Ce sont les premiers mots de cette lettre. Le pape site la parole du Christ avant le dernier repas avec ses disciples : « J’ai désiré d’un grand désir manger cette Pâque avec vous, avant de souffrir ! » (Lc 22, 15). S’ensuit une longue méditation sur le sens de la liturgie comme lieu de la manifestation gratuite de la présence de Dieu, ici et maintenant, le lieu de rencontre entre le Créateur et l’Église, « sacrement du corps du Christ ». C’est librement que Jésus se donne à son Église – qu’il a voulu et veut encore aujourd’hui se donner à nous, par le don de sa Parole et de sa Chair à manger. Ce n’est donc pas tant nous qui « faisons la liturgie » que la liturgie (le Christ agissant dans la liturgie) qui nous « fait » devenir chrétiens, façonne notre identité chrétienne.
Le successeur de Pierre revient ensuite sur les bienfaits spirituels de la liturgie pour les chrétiens, en commençant par un sujet qui lui tient à cœur : « La Liturgie est, par sa nature même, l’antidote le plus efficace contre la mondanité spirituelle » qui prend la forme de deux “poisons” qui ont marqué l’histoire de l’Église, jusqu’à aujourd’hui : le gnosticisme (réduire
la foi chrétienne à une connaissance désincarnée) et
le néo-pélagianisme (s’imaginer que ce sont nos seuls actes humains qui nous sauvent).
La conclusion du document explicite les intentions profondes de son auteur : « Je voudrais que cette lettre nous aide à raviver notre émerveillement pour la beauté de la vérité de la célébration chrétienne, à nous rappeler la nécessité d’une authentique formation liturgique, et à reconnaître l’importance d’un art de célébrer qui soit au service de la vérité du Mystère Pascal et de la participation de tous les baptisés à celui-ci, chacun selon sa vocation. »
Ma lecture s’est particulièrement arrêtée sur ces mots, particulièrement puissants : « (Célébrer) l’Eucharistie, c’est être plongé dans la fournaise de l’amour de Dieu. Lorsqu’il nous sera donné de comprendre cette réalité, ou même simplement d’en avoir l’intuition, nous n’aurons certainement plus besoin d’un Directoire qui nous imposerait le comportement adéquat. Si nous en avons besoin, c’est à cause de la dureté de notre cœur. La norme la plus élevée, et donc la plus exigeante, est la réalité même de la célébration eucharistique, qui sélectionne les mots, les gestes, les sentiments qui nous feront comprendre si notre usage de ceux-ci est ou non à la hauteur de la réalité qu’ils servent. Il est évident que cela ne s’improvise pas. C’est un art [qui] demande un entretien assidu du feu de l’amour du Seigneur qu’il est venu allumer sur la terre (cf. Lc 12, 49) » (N°57).
Je ne peux que vous partager mon « coup de cœur » et vous recommander fraternellement la lecture de cette lettre à chacun de vous, amis paroissiens, spécialement à vous, les acteurs de nos liturgies (prêtres ou officiants des funérailles, équipes liturgiques, lecteurs, musiciens, porteurs de la communion, etc.).
Père Rémy CROCHU