L’harmonie à l’intérieur de l’homme
Nous fêtons la Pentecôte. Que pouvait-il manquer à la joie des apôtres, on se le demande, qui avaient vu leur Maître vivant, ressuscité du tombeau ? Pouvait-il y avoir une joie plus grande que de le contempler dans l’éclat de sa Vie divine ? La Pentecôte est venue apporter la réponse. Pas moins inattendue. Pas moins essentielle aussi. Ils devaient faire l’expérience que Jésus avait promise à plusieurs reprises, déjà : l’expérience en eux de l’Esprit-Saint.
Cela paraît abstrait, dit comme cela. Du reste les apôtres, au lendemain de la Résurrection mais aussi après la Pentecôte, ont continué de vivre comme avant : une vie avec ses contraintes et ses imprévus, une vie pas moins éprouvée et éprouvante. Ils continueront d’être confrontés à leur propre tempérament, leurs propres pauvretés aussi. Ils ne changeront pas de nature. Alors, qu’a donc changé en eux l’Esprit-Saint pour qu’il soit reconnu par eux comme une « personne vivante » qui vous habite et vous change ? « l’Esprit a apporté dans la vie des disciples une harmonie qui manquait, la sienne, parce qu’Il est harmonie. Harmonie à l’intérieur de l’homme » (pape François, dans son homélie du 9 juin 2019).
Tout est dit en quelques mots. L’harmonie, au sens musical du terme, qui fait sortir du chaos notre vie quotidienne, souvent dispersée, morcelée, éclatée (« je m’éclate »), et même fracassée parfois.
« A l’intérieur (continue le pape François), dans le cœur, les disciples avaient besoin d’être changés. Leur histoire nous dit que même voir le Ressuscité ne suffit pas, si on ne L’accueille pas dans le cœur. Il ne suffit pas de savoir que le Ressuscité est vivant si on ne vit pas comme des Ressuscités. Et c’est l’Esprit qui fait vivre et revivre Jésus en nous, qui nous ressuscite intérieurement. »
Nous avons à « réorchestrer » sans cesse notre vie, en chassant les « fausse notes » (les mots de trop, les jalousies, les indifférences), les « désaccords » (la tentation d’imposer son point de vue), les « dissonances » (les « oui, mais », les à peu près). Pour le monde dans lequel nous vivons, l’harmonie ne semble plus de mode, jusqu’à être bannie.
Et le pape François continue : « L’Esprit-Saint » est paix dans l’inquiétude, confiance dans le découragement, joie dans la tristesse, jeunesse dans la vieillesse, courage dans l’épreuve. C’est Celui qui, entre les courants tempétueux de la vie, fixe l’ancre de l’espérance. C’est l’Esprit qui, comme le dit aujourd’hui Saint Paul, nous interdit de retomber dans la peur parce qu’il nous fait nous sentir fils aimés (cf. Rm 8, 15). C’est le Consolateur qui nous transmet la tendresse de Dieu. Sans l’Esprit, la vie chrétienne est effilochée, privée de l’amour qui unit tout. Sans l’Esprit, Jésus demeure un personnage du passé, avec l’Esprit il est une personne vivante aujourd’hui ; sans l’Esprit, l’Écriture est lettre morte, avec l’Esprit elle est Parole de vie. Un christianisme sans l’Esprit est un moralisme sans joie ; avec l’Esprit il est vie. »
Demandons ensemble le don de l’Esprit, l’harmonie de Dieu, pour nous-mêmes et pour le monde qui en a tant besoin.
Père Rémy CROCHU